Seconde fois que je tente mon petit périple en Suisse pour le Festival Tous Écrans qui se déroule à Genève du 6 au 13 novembre 2014. Cette année, j’ai pu venir 2 jours sur place le 10 et 11 novembre. Voici le récit de mon expérience au Festival Tous Écrans :
Je commence par une projection de la série néerlandais Hollands Hoop : un sorte de Breaking Bad version Hollande.
Synopsis : Revenu dans sa ferme natale pour enterrer un père qu’il haïssait, un psy démissionnaire découvre que le domaine familial dissimule une gigantesque plantation de cannabis.
Premières impressions TV : le concept est original et il fait penser à Breaking Bad mixé avec la série Weeds. Cependant, barrière de la langue ou pas, il est difficile de s’accrocher aux personnages et la série part très vite dans des délires qui m’ont laissé dubitative.
Après je me balade dans les différents lieux du Festival. Il faut savoir que cette année, le festival Tous Écrans inaugure un nouveau lieu le Pitoëff plus grand et mieux aménagé que le Grütli, même si ce lieu reste occupé pour certaines projections. Au Pitoëff, il y a les casques Oculus Rift à tester : ce sont des périphériques informatiques de réalité virtuelle. Mais le plus sympa reste sans conteste le drive-in installé dans la cour de l’établissement. Choisissez votre voiture, mettez votre couverture et regardez des séries des années 90 (Friends, Sauvés par le Gong, Le prince de Bel-Air, Beverly Hills, Twin Peaks…etc.) sur écran géant. Revoir deux épisodes cultes de Friends saison 2 et saison 4, c’était vraiment sensas !
Journée spéciale workflows, sorte de table ronde sur des thématiques médias :
1. Nouveaux métiers pour nouveaux médias : producteur numérique.
invités : Arnaud Colinart (Agat Films, France) et Micho Marquis-Rose (Attraction, Canada) le tout est modéré par Oriane Hurard.
Comme le dit le québécois Micho Marquis-Rose : « la fiction TV se prête à un volet numérique ». En revanche, quand on fait du transmédia, il faut faire ses preuves vite car on défend un modèle contrairement au cinéma où un mauvais film ne risque pas de détruire l’économie du cinéma pour autant. Un véritable challenge parce que sur le web le public est explosé et la question à se poser est : pourquoi les gens iront voir un projet Radio Canada ou France Télé ?
A cette question, il faut penser au volet financier et là, Micho Marquis-Rose avoue qu’il faut être tout aussi « créatif financièrement« . Au Canada, les producteurs indépendants web peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt sous certaines conditions et d’autres aides existent pour financer le développement créatif. Arnaud Colinart compare avec la France où selon lui, il y a une inadéquation entre le financement du CNC et le financement de la chaîne. Il y a un besoin d’une convention collective web. D’ailleurs, une discussion avec le CNC est entamée pour la revalorisation de la web fiction.
Sur le cas France, Arnaud Colinart regrette que les projets web passent à la télévision sans financement convenable ce qui tend à la paupérisation de la télévision. Revaloriser le montant dans la fiction semble essentiel. D’ailleurs, ce qui peut expliquer le manque de budget pour le drame profond et le choix du programme court ou de la comédie.
Petite information, la série des Peaky Blinders sera diffusée en mars 2015 sur Arte et un dispositif web sera mis en place.
Le workflow s’achève avec 2 étude de cas :
- Type Rider : projet présenté par Arnaud Colinart, il s’agit d’un jeu vidéo et social game pour Arte lancé en 2013. Le concept : l’histoire de la typographie des origines de Gutenberg au Comic sans MS en passant par Heveltica. Plus de 120 000 téléchargements aux USA !
- Qu’est-ce qu’on mange pour souper ? : une émission culinaire canadienne diffusée sur Radio Canada qui a bénéficié d’un dispositif 360. Le téléspectateur est aidé pour réaliser la préparation avec un coach culinaire. Véritable assistant, le coach culinaire prend en compte vos allergies, le nombre de personnes à faire la préparation avec vous, si vous faites la recette avec un enfant et plein d’autres éléments ludiques. L’émission est diffusée au Canada à 17h alors sur Twitter de 17h à 19h : une assistance est proposée si vous rencontrez un problème.
2. Etude de cas : La TV devient transmédia
Sont présentés en détail deux études de cas transmedia français.
- L’expérience Real Humans (série suédoise) avec Arte présenté par Arnaud Colinart.
2 sites ont été imaginés : le hubot market sur le modèle d’un site du type Sarenza et réalisé en
3 mois. Quant au site Atsugi Robotics sur le modèle d’un site comme Audika et réalisé en 6 mois. Le succès est tel que le service client a reçu 500 appels de potentiels acheteurs de robot ! Opération clone avec Atsugi Robotics au festival Séries Mania, d’ailleurs, j’en avais gagné mon clone au concours.
Le concept : Anarchy est une œuvre de création collective qui vous propose de vous immerger dans une France chahutée, d’écrire son histoire et de la raconter telle que vous l’imaginez. Les personnages et les histoires sont les vôtres.
Ce projet est composé de 15 journalistes/auteurs et d’ internautes engagés. 2 000 comptes créés sur le site Anarchy soit plus de 1 000 personnages créés dont 300 personnages actifs. Les personnages crées peuvent être intégrés dans la fiction dans 1 des 8 épisodes de 26 minutes diffusés le jeudi soir. Pour info, le temps passé sur le site Anarchy est de 12 à 13 minutes ce qui signifie que les gens restent.
L’objectif : fédérer des gens autour d’un projet nouveau et innovant.
C’est beau tous ces projets ! Mais je me demande toujours comment est-ce qu’on assure la continuité de ce genre de dispositif dans le temps ?
Pour Anarchy, la décision n’a pas encore été prise car le projet est en cours. Pour Real Humans, à chaque saison le dispositif est réactivé mais problème pas de saison 3 de Real Humans. Alors, les sites resteront en ligne mais sans ajout de contenu. Autour des comptes Twitter et des sites, un fan club sur la robotique s’est créé et peut-être à terme, ils deviendront un espace de curation sur le sujet.
3. Adapté par : vices et vertus de l’adaptation
invités : Nicolas Peufaillit, scénariste des Revenants, Nickolaj Scherfig, scénariste de la série suédo-danoise Broen et Daniele Casarano, scénariste de la série italienne Romanzo Criminale.
- Les adaptations de la série suédo-danoise Broen/TheBridge/Tunnel
Pour parler du sujet le danois Nicolaj Scherfig déçu de l’adaptation franco-britannique de sa série. En effet, même si lui et son équipe ont pu voir le script avant le tournage, ils trouvaient que Tunnel manquait d’ambition. Il reproche le manque de travail dans la relation franco-britannique là, où les américains s’en sortent mieux avec The Bridge. Le scénariste trouve que la relation américano-mexicaine est plus intéressante et mieux traitée. En bref, Nicolaj Scherfig regrette le choix de l’efficacité pour Tunnel au lieu du choix de l’artistique. Pour info, la saison 3 de Broen débute en mai.
- Romanzo Criminale adapté en France sous R.I.S
Daniele Casarano est scénariste de Romanzo Criminale : une série adaptée d’un livre mais dont il s’est détaché assez rapidement malgré les frayeurs du diffuseur. Pour lui, l’important est d’écrire quelque chose que l’on a envie de voir et pas ce que les gens veulent voir. Quant à l’adaptation française de sa série, il l’a appris en lisant le journal. Il n’a pas été impliqué dans le processus d’adaptation. Le scénariste italien est très critique envers les adaptations car selon lui : « avec les adaptations, on perd les défauts de l’original ». Même s’il considère Hatufim et Homeland comme deux séries très différentes, il dit « A part Homeland, les adaptations américaines sont bien moins bonnes que les œuvres originales ». A méditer !
- Les Revenants et ses nombreuses adaptations en devenir
Nicolas Peufaillit a participé, il y a 6 ou 7 ans à la bible des Revenants c’est-à-dire le fondement de la série. La bible est un document contenant toutes les références pour l’élaboration collégiale de scénarios de séries TV. Par exemple, c’est lui qui a eu l’idée des jumelles dont l’une meurt celle qui est la dominante pour inverser les rapports entre les deux personnages quand cette dernière revient à la vie. Le scénariste français est également assez critique envers les adaptations car il part du principe suivant : « pourquoi changer l’original quand les bases sont déjà bonnes » ? Pour info, Nicolas Peufaillit travaille sur un projet de série pour Arte. Affaire à suivre …
Mon Festival Tous Ecrans s’achève avec deux visionnages :
Sensitive Skin, la série avec Kim Cattral et créée par Hugo Blick, le même créateur de The Honourable Woman (Critique à venir).
Marsman, une série flamande.
Synopsis : Marsman n’a plus de boulot, sa femme est partie, sa mère vient de mourir. Heureusement, il lui reste son frère autiste, sa fille un brin judicatrice et ses potes attardés.
Premières impressions TV : de bonnes blagues mais ça manque un peu d’action et donc un peu mou.
Pour en savoir plus sur le Festival Tous Écrans, rendez-vous sur leur site Intenet : www.tous-ecrans.com
NB : Genève est à 3h de train de Paris !
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