Après Engrenages, la showrunneuse, Anne Landois, créé la série 66-5 pour Canal + ! La scénariste creuse le volet de la justice pénale avec le personnage de Roxane Bauer Jeune avocate d’affaires dans un prestigieux cabinet parisien, Roxane voit sa vie bouleversée quand son mari, associé du cabinet, est accusé de viol. Ramenée malgré elle dans la cité de son enfance, elle va tenter de se reconstruire en tant qu’avocate pénaliste au tribunal de Bobigny. Une série brillante et encore une réussite d’Anne Landois présentée en avant-première au festival de la fiction TV de La Rochelle. C’est à cette occasion que j’ai discuté de la série avec Anne Landois et ses comédiens Alice Isaaz qui joue le rôle de Roxane Bauer, Nailia Harzoune joue Yasmine, meilleure amie d’enfance de Roxane et Raphael Acloque qui interprète Bilal, trafiquant et ancienne connaissance de Roxane.
Pourquoi ce titre de 66-5 ? C’est une référence à un article de loi : ARTICLE 66-5 DE LA LOI DU 31 DÉCEMBRE 1971 En toutes matières, (…) les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, (…) et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel.
Plaidoirie des comédiens de la série !
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66-5 : l’après ENGRENAGES !
Vous travaillez avec des consultants et vous connaissez à présent très bien le milieu judiciaire que ce soit avec Engrenages ou cette série 66-5, comment parvenez-vous à vous détacher de la réalité pour fictionner ?
Anne Landois : « C’est difficile de le dire, parce que parfois, ça m’échappe moi même, je pars vraiment d’abord du personnage. Une héroïne, un personnage. Je peux écrire sur le papier: elle est avocate, mais ça veut rien dire, parce que qu’est-ce que ça veut dire qu’un personnage est avocate? Roxane, c’est Roxane. Mais si, demain, je crée un autre personnage d’avocate elle elle fera son métier d’une autre façon. Donc, c’est plutôt, c’est le personnage qui va dicter la façon dont elle va travailler et dont elle va s’emparer de ce métier, se faire un nom, réagir, la façon dont elle va défendre. J’ai envie dire que tout part du personnage et là, on a une jeune avocate, qui est un peu brisée dans son la à cause de l’accusation de viole contre son mari. Elle peut pas l’aider elle est empêchée, alors que c’était maintenant ou jamais. Et ce refus de la fatalité, en plus, qu’elle trouve totalement injuste, c’est quand même aussi une femme qui se bat contre cette injustice. Et c’est c’est cette énergie là qui m’intéressait et c’est la situation qui montre son énergie. Si finalement, heureusement que son mari a été accusé de viol, parce que sinon, elle aurait peut être fait une carrière très médiocre dans un cabinet d’affaires là, elle a été contrainte de déployer tout son talent, aussi bien dans la vie qu’à l’audience pour s’imposer et c’est ce qu’elle va faire tout le temps, tout le temps, tout le temps, c’est parce qu’elle a cette blessure originelle, d’abord quand elle a quinze ans et qu’elle quitte sa cité, puis ensuite, au début de la série, elle est éjectée du cabinet. Donc, elle est obligée d’aller se réinventer ailleurs et, tant qu’à faire, autant serait inventé là où, comme on connaît un peu les codes, et c’est son histoire, ce qui fait que, après moi, quand j’entends que Clarisse parler, quand j’assiste à des audiences,Clarisse Serre, qui est ma consultante, qui est la pénaliste avec laquelle je travaille depuis, engrenage, que j’accompagne dans beaucoup d’audience je l’ai vu énormément travailler etelle a une énergie, un tempérament. Je me suis beaucoup inspiré pour le personnage dont, et c’est une grande professionnelle du droit, c’est une femme qui, qui ne lâche rien, elle a une force de travail qui est colossale, elle a une mémoire, elle, elle connaît ses dossiers sur le bout des doigts. Et ça, c’est passionnant. C’est passionnant, parce que raconter l’histoire d’une avocate, il faut que ce soit du détail, il faut que ce soit de l’ordre de détails, parce que le diable se cache dans les détails. Et c’est parce qu’on va travailler sur le réalisme, sur la procédure et sur ce que ça, ce qui est fondamentalement de métier d’avocat qu’on va être original, parce que sinon, on reste sur une sorte de d’encéphalogramme un peu plat ou il n’y a pas de surprise. Tout le monde c’est ce que c’est qu’un avocat, mais fondamentalement, c’est qui Roxane Bauer et c’est son personnage qui va, parce que c’est son personnage qui va nous surprendre comme avocate. »
L’affaire qui sert de fil rouge à la saison 1 de 66-5 est une affaire plaidée par votre consultante !
Anne Landois : « J‘ai suivi pendant quinze jours m’affaire, qui a eu lieu à la JIRS de Paris, qui est la juridiction interrégionale spécialisée, c’est tout ce qui est crime organisé, un grand banditisme et crime organisé, beaucoup de trafics de stupéfiants, et il y avait à l’audience énormément de tensions, parce qu’il y avait une très forte opposition entre le ministère public et les avocats qui estimaient qu’il y avait eu une infiltration qui était irrégulière et qui ont tout fait pour le prouver. C’est intéressant, parce que ce sont des conflits qui, dramatiquement, sont passionnants. Donc, moi, j’ai pris des milliards de notes et et je me replongeais dans ces notes là, parce qu’à l’audience on sent les trucs qui sont intéressants, mais on n’a pas le droit de réfléchir tout de suite. Donc, j’écris j’écris j’écris et après, à tête reposée, je commence à extraire, je me dis : tiens, ça, c’est intéressant! Et après, je reparle à Clarisse et je lui dis : mais, tiens à l’audience quand il s’est passé ça, et après je fais de la fiction. Par dessus, ce qui est important, c’est le romanesque. D’abord la base, elle est solide, mais après, il faut rajouter du romanesque, sinon on peut s’ennuyer ».
Dans Engrenages, plusieurs volets d’une affaire était exploré du point de vue de la police, des avocats et des juges et procureurs. Dans 66-5, vous vous concentrez sur le volet « avocat », c’était une envie de creuser le sujet ?
Anne Landois : « Parce que c’est plus rare, d’abord pour tout dire, quand même, j’avais dans l’idée de développer une nouvelle série policière avec Canal + parce que de toute façon, Engrenages allait s’arrêter un jour. Moi, quand j’ai passé la main, c’était la saison six. C’est Marine Francou qui a pris la suite. On savait bien qu’il y aurait pas encore quinze saisons d’Engrenages. Il y a eu deux très jolies saisons qui ont terminé vraiment la série et à un moment, on s’est dit: ce serait peut être pas mal de renouveler. Et moi, je n’ai pas réussi parce que repartir après Engrenages, sur une nouvelle série policière pour Canal +, je ne savais pas où allaer parce que, à chaque fois, j’avais l’impression de voir Laure Berthaud, Gillou, Tintin et je n’arrivais pas à faire abstraction des personnages. Il m’habitait encore et, je me suis réveillée un matin en me disant : mais il y a un personnage que j’ai peu travaillé finalement, même si elle est très présente quand même, Joséphine Karlsson. Mais il y a quand même toute une dimension de la justice pénale, et notamment de la défense, qui n’est pas creusée autant que je l’aurais souhaité, parce que ce n’était pas le propos non plus. Et j’en ai parlé avec Clarisse et je lui ai dit : écoute, si tu m’aidais est-ce que tu serais d’accord pour m’aider à faire une série sur les pénalistes. Et là, elle m’a dit: évidemment ! Et ça a correspondu aussi à un moment très particulier, celui où elle est partie à Bobigny parce qu’elle avait un cabinet à Paris, et elle est partie s’installer à Bobigny. Je me suis inspiré de ça et ça m’avais pas encore le point de départ. Je savais qu’elle était née en banlieue, qu’elle avait grandi en banlieue, ma Roxane, mais par contre, j’aimais bien l’idée qu’elle y retourne. Et avant de trouver l’élément déclencheur qui allait provoquer ce retour en arrière, les accusations de viol contre son mari, je savais qu’elle allait à Bobigny, parce que je voyais que lClarisse avait fait ce choix complètement hallucinant, alors qu’elle avait un cabinet dans le sixième, que tout le monde lui disait mais était complètement folle : qu’est-ce que tu as aller faire à Bobigny? Elle dit très simplement : mais je vais là où sont des clients ? Tout simplement, mes clients, ils ne sont pas dans le sixième. C‘était très courageux de sa part de faire ça. Et ça m’a vraiment inspiré. Et le tribunal en lui même est très inspirant. Le tribunal de Bobigny, d’abord architecturalement, il y a quelque chose de de très moderne. On sort complètement des vieilles pierres, du côté un peu suranné de la justice, qu’on avait vraiment représenté dans Engrenages à l’époque moi, quand je travaille sur Engrenages, il n’y avait pas encore le nouveau tribunal de Paris, un tribunal judiciaire qui est très différent. Mais j’aimais bien ce contraste avec Bobigny, qui est un barreau très particulier, qui est très jeune, très militant. Il y a beaucoup de jeunes avocates, beaucoup de jeunes magistrats, beaucoup de jeunes flics aussi, même si c’est pas le volet que je développe le plus. Et c’est en fréquentant Bobigny, en allant à énormément de comparatif immédiate, que je me disais c’est un vivier, très bouillonnant. »
Peut-on y voir quelques airs de The Good Wife dans 66-5 ?
Anne Landois : « J’y pensais plus du tout à The Good Wife. Je sais qu’à un moment, j’y avais pensé, à cette différence près, c’est que The Good Wife, c’est une femme qui ne travaillait plus et qui va reprendre du métier. Moi, ce que j’avais vraiment envie de traiter avec Roxane, c’est que c’est une ascension qui démarre. C‘est un personnage en pleine ascension et d’un seul coup, ça s’arrête et quand on est jeune avocate, ça doit pas s’arrêter maintenant. C’est justement maintenant qu’il faut qu’il faut le faire. Et je trouve que cet élan, cette volonté de ne pas s’arrêter maintenant, alors qu’elle est prête, il y a quelque chose qui lui donne cette énergie, qui qui fait qu’on n’est pas dans de Good Wife, qui était plus un personnage endormi, qui est ensuite doit se remettre en selle, avec parfois des choses qu’elle sait plus, qu’elle a un peu oubliée. Elle est plus vraiment confrontée à la justice que là, Roxane, c’est un personnage qui est prêt, mais maintenant, c’est où est-ce que je vais plaider ? Elle cherche un endroit où plaider et elle cherche un endroit où exister comme avocate ».
66-5 (8×52′) est à découvrir sur Canal +
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