[ITW] ANN MING : LE COMBAT D’UNE MÈRE – les secrets de réalisation d’Erik Richter Strand !

[ITW] ANN MING : LE COMBAT D’UNE MÈRE – les secrets de réalisation d’Erik Richter Strand !

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Ann Ming a passé dix ans de sa vie à combattre une loi anglaise obsolète afin de rendre justice à sa fille, froidement assassinée ainsi que 35 autres familles qui ont fait face à la même injustice qu’elle a vécue. La réalisation de cette mini-série britannique ANN MING : LE COMBAT D’UNE MÈRE a été confiée au réalisateur norvégien Erik Richter Strand, qui commence à se distinguer chez les Anglais après avoir réalisé six épisodes de Mon Amie Adèle et quatre épisodes de The Crown. C’est la première série anglaise dont il réalise l’intégralité et sur laquelle il peut mettre sa patte de réalisateur. Erik Ritcher Strand a déjà créé la série norvégienne Valkyrien dont il réalise l’intégralité des épisodes et il a aussi réalisé des épisodes de la série Occupied. Lors d’un échange en visio, j’ai pu discuter Erik Ritcher Strand des secrets de tournage de la mini-série.

Mon avis sur Ann Ming : Le Combat d’une Mère !

Quel a été votre principal défi de réalisateur sur cette mini-série ?

Erik Ritcher Strand : « Le plus grand défi a été de maintenir le niveau d’intensité émotionnelle, parce que c’est une série très chargée émotionnellement, et tout particulièrement pour Sheridan Smith (interprète d’Ann Ming). Pour elle, le défi consistait à trouver le bon équilibre entre les moments de chagrin et de deuil, mais aussi ceux de joie et de bonheur, car c’est un véritable tourbillon d’émotions au fil des quatre épisodes. Il est donc important qu’elle ne donne pas tout dès le premier instant. Elle traverse tant d’épreuves terribles, comme la découverte du corps de sa fille décédée, puis les procès, tous les revers, et aussi les petites victoires en cours de route. Il s’agissait donc de s’assurer que Sheridan et moi trouvions ensemble une manière d’ajuster ces émotions afin de préserver une véritable dynamique émotionnelle. »

Un hommage à Ann Ming et sa fille Julie

Est-ce que la véritable Ann Ming a été une précieuse consultante pour vous lors du tournage ?

Erik Ritcher Strand : « Je ne l’ai pas consultée à proprement parler. Je sais que Sheridan a eu un peu plus de contacts avec Ann Ming, puisque, évidemment, elle est toujours bien vivante et parmi nous, et qu’elle se trouvait dans la région où nous tournions. Il était donc naturel pour elle et pour nous de faire appel à elle comme consultante. Et elle a été impliquée dans l’écriture du scénario dès le tout début, puisque c’est une adaptation d’un livre qu’elle a écrit sur ce qu’elle a vécu, For the Love of Julie. Donc, elle était embarquée dans le projet dès le départ. Je ne dirais pas qu’elle a été très présente pendant le tournage, mais elle est venue sur le plateau quelques fois, je crois peut-être trois fois. Et bien sûr, ça change la dynamique : tout le monde est très conscient de sa présence, et c’est quelque chose de profondément émouvant pour elle de voir son propre vécu rejoué de cette manière. Nous avons donc été très respectueux à son égard. Elle nous a donné des indications, notamment sur les accents, sur la façon dont les gens étaient réellement, sur le fait de savoir si nous étions proches de ce qui s’était vraiment passé et de ce qu’elle avait ressenti. Et, vous savez, le plus grand compliment qu’elle pouvait nous faire, c’était de dire : « C’est exactement ce qui s’est passé, et c’est exactement ce que j’ai ressenti. » Elle a donc été une consultante très précieuse pour le projet. Mais, pour elle comme pour nous, nous avons trouvé une sorte de juste milieu, une distance saine, afin que cela ne soit pas trop compliqué ni trop difficile émotionnellement pour elle, et pour que, de notre côté, nous ne nous sentions pas privés de la liberté de dramatiser son histoire de la façon qui nous semblait la plus juste pour le public. »

Puis, il y a cette brillante idée de faire apparaître Ann Ming à la toute fin dans une scène dansante. D’où est venue cette idée et comment l’avez-vous mise en œuvre ?
Erik Ritcher Strand :  » C’est une idée qui était déjà intégrée dans le scénario, et qui est née très tôt dans le processus. Nous savions dès le départ que la danse en ligne faisait une très grande partie de la vie d’Ann Ming, et c’est toujours le cas aujourd’hui : elle continue encore à la pratiquer. C’était donc l’un de ces rares moments de ressenti positif, un espace de liberté, un espace de sécurité où elle pouvait simplement prendre du plaisir. Nous savions donc que nous allions terminer là-dessus. Et je savais aussi que ce serait bien d’essayer d’inclure Ann d’une certaine manière, sans briser le quatrième mur, si vous voyez ce que je veux dire, sans que les acteurs regardent directement la caméra ou fassent quelque chose de trop frontal. Le seul endroit où cela pouvait vraiment fonctionner, c’était tout à la fin, pour que l’on ait ce sentiment de : « Voilà, c’est nous qui racontons cette histoire, mais elle est réellement là, et c’est son histoire. » Et j’ai le sentiment que nous avons réussi à très bien le faire. Ça a été une journée difficile. Toute la scène finale de danse en ligne, les cinq dernières minutes de la série ont été tournées en une seule journée. Techniquement, c’était assez complexe, parce qu’il y avait beaucoup de danseurs, du dialogue par-dessus, et de la musique que les figurants ne pouvaient pas vraiment entendre, sinon ça couvrait les dialogues. Ils ont donc dû chorégraphier et apprendre la danse à l’avance. Il y a aussi un moment dans la scène où le personnage de Sheridan Smith voit sa fille reprendre vie sous ses yeux, et elles partagent un instant ensemble. On crée donc une sorte de magie à l’intérieur de la scène, puis on la brise pour revenir à la réalité, et ensuite, à la toute fin, Ann Ming entre en scène. Il y a donc plusieurs niveaux de narration dans une seule scène. Pour moi, c’est probablement la scène la plus difficile que j’aie eu à mettre en scène. »

ann ming le combat d'une mère
Victoria Wyant
© 2024 Anastasia Arsentyeva/Hera Pictures/ITV

De faire de Julie, la fille d’Ann Ming, un fantôme bienveillant tout au long du combat de sa mère, est-ce important pour vous ?

Erik Ritcher Strand : « De toute évidence, la série donne l’impression d’être centrée sur Julie. Elle parle de Julie. Le livre s’intitule For the Love of Julie, et il parle du fait que Julie a disparu. Il s’agit donc de maintenir Julie vivante à travers le souvenir. C’est presque une manière de rappeler au public pourquoi Ann se bat depuis toutes ces années : c’est parce qu’elle veut honorer la mémoire de sa fille. Nous voulions trouver un moyen de faire revenir Julie, pour avoir quelques flashbacks répartis sur les quatre épisodes. Et puis, il y a aussi quelques moments où apparaissent ces sortes de visions, où Ann a cette expérience très subjective de rencontrer presque sa fille. C’était clairement quelque chose que nous voulions faire, mais sans dialogue. Nous voulions les mettre en scène de façon réaliste, tout en faisant comprendre au public que cela se passe dans la tête d’Ann. Il peut y avoir une ou deux secondes où l’on se demande : « Attends, qu’est-ce qui se passe ? », puis on comprend — et l’impact émotionnel est alors plus fort. Nous avons beaucoup travaillé, en essayant de trouver une manière délicate de le faire, parce que c’est un terrain délicat pour un cinéaste : introduire ce genre de ruptures avec la réalité dans une série qui est par ailleurs très réaliste. Il y a tellement de choses qu’il fallait réussir : l’âge des personnages, l’époque, l’apparence des voitures, les costumes… Tout devait sembler authentique. Et puis il y a ces rares moments où l’on brise cela pour inviter le public dans une expérience très subjective. »

Quel message aimeriez-vous que le public retienne d’Ann Ming : Le Combat d’une Mère ?

Erik Ritcher Strand : « Je pense que ce serait de ne pas abandonner. C’est sans doute le résumé le plus simple : ne pas renoncer, même quand on a l’impression que tout joue contre soi. Mais aussi que c’est, je l’espère, quelque chose d’inspirant : voir que même une loi, ce que nous considérons comme ce qu’il y a de plus précieux et de plus respectable dans une démocratie moderne, et qui semble protégée par toutes ces institutions et des traditions séculaires, même une loi comme celle-là, si elle est injuste et manifestement contraire au simple bon sens, peut être contestée. Et l’on peut rallier tout le monde à sa cause si l’on reste fidèle à ses principes. Et je pense que c’est précisément ce que cette série réussit très bien à montrer. »

Ann Ming : Le Combat d’une Mère (She Fought The Law • 4×60′) est à découvrir sur Polar + !

Lubiie

Experte dans le domaine des séries, blogueuse passionnée depuis 2006, professionnelle de l'audiovisuel, reporter de festival, jury de festival et intervieweuse aux multiples questions en séries. Tout mon monde tourne autour de l'actualité des séries.

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