Un monde sans prison est-il possible ? Serait-ce UN MONDE MEILLEUR ? La série de Alexander Lindh et Laurent Mercier fait l’hypothèse d’une autre justice et propose un examen critique du système pénal. Un maire libéral et une scientifique mettent en place un programme de réinsertion révolutionnaire avec l’objectif de fermer la prison de la ville et de réintégrer les détenus dans la société. Scientifiques, travailleurs sociaux et politiciens sont à l’œuvre. De retour en ville, les prisonniers doivent faire face aux préjugés et aux échecs. Les habitants, les victimes et leurs familles oscillent, eux, entre désir de pardonner et besoin de justice. Un monde sans prison est-il possible ?
Un Monde Meilleur a été présenté en avant-première au festival Canneseries et j’ai eu l’opportunité de rencontrer le légendaire Richard Sammel et sa collègue l’actrice allemande Maria Hofstätter pour un entretien vidéo très chouette ainsi que le co-créateur de la série et la caution française de la série Laurent Mercier pour disséquer la série en profondeur.
Pour Laurent Mercier, co-créateur d’Un Monde Meilleur, la révélation « sérielle » c’est la série Oz de Tom Fontana qu’il a regardé jadis sur VHS : « Pour moi, c’était le moment où je comprenais la magie, la puissance du récit sériel, l’exploration thématique et toutes ces choses là. Elle a toujours laissé une trace chez moi sur le carcéral« . Donc, Laurent Mercier avait quelque chose à raconter sur le monde carcéral comme il le dit : « J’avais envie de faire une série sur les prisons, mais qui poursuive le genre qui ne soit pas dans la redite, qui ne soit pas que dans le constat des défaillances du système carcéral ». Alors il fallait se distinguer des autres séries sur le genre et cela passe par le « twist d’anticipation sociale, en étant au contraire plutôt volontariste, à essayer de trouver des solutions. Mais au final, ça traite des mêmes questions qu’une série classique, simplement sous un angle, un peu nouveau, un peu plus avancé» – explique Laurent Mercier.
Une série qui ne pouvait pas se faire en France comme le justifie Laurent Mercier : « Le système carcéral est dans un état très dégradé. En France, la série n’aurait pas du tout été la même. Je pense qu’au sein de la société française, on aurait vu beaucoup plus la science fiction, le futur, le côté irréaliste de la chose, alors que le système allemand est déjà beaucoup plus progressiste. Les prisonniers sont déjà sous les peines de un an, automatiquement ont des peines non incarcérées. Donc, on y croit presque que cela puisse arriver« . D’ailleurs, l’illusion a réellement fonctionnait comme le confie le scénariste dans une anecdote de tournage : « Ils ont tourné à Mönchengladbach, une ville à côté de Cologne et dans la grande salle où on voit le programme dans les bureaux qui sont au cœur de la ville. Pour la déco, il y avait des posters qui expliquaient le concept. Les gens du quartier, il y en a qui ont cru que c’était vrai et qui ont commencé à râler». Un autre exemple que la fiction peut devenir réalité pour certains.
Un Monde Meilleur est une série high concept et le plus difficile dans ce genre de série, c’est de tenir le concept sur plusieurs épisodes. Alors, cela passe par définir des règles et pour Laurent Mercier et son co-auteur Alexander Lindh, ça était le premier défi : « Le début va être que la ville a accepté. Un maire est favorable à ce programme. Il est porté par une criminologue, une activiste abolitionniste des prisons qui veut aller à fond. C‘est pour ça qu’elle intègre même le personnage du pédophile, le personnage de l’assassin parce qu’elle veut tout englober. Elle veut en profiter et pas commencer petit et nous de la même façon, c’est pareil. On a aucune chance de traiter cette chose là en série. Donc on avait envie d’avoir l’approche le plus large. Mais effectivement les règles, qu’est ce qui se passe si quelqu’un commet un crime demain dans la ville ? C’est ce qu’on voit en début de deuxième épisode mais le traiter. L‘aspect ‘règles’ nous a beaucoup posé des questions comme l’aspect recherche. Quand on commence un projet, il y a toujours que des recherches, rencontres de nombreuses personnes ou de éducateurs, de gens qui ont fait la prison, d’associations, de chercheurs, de sociologues. Ensuite, c’est d’arriver à l’incarner au travers de personnages et de trajectoires touchantes qui explorent chacun une réaction à cette situation de départ. Celui qui va réussir, celui qui ne va pas réussir, celui qui croit qu’il va réussir à s’effondrer. Et puis surtout arriver à lier les personnages entre eux, qui se croisent, et se retrouvent, etc. Enfin, l’aspect romanesque du récit. » Et parmi les personnages, il y a un qui n’était pas évident à écrire comme le confie Laurent Mercier : « Le personnage du pédophile, c’est un vrai challenge. C’est difficile. D’abord, il a fallu convaincre les gens qu’on le fasse parce qu’il y avait des discussions avec les diffuseurs. C’‘est un sujet hyper touchy et en même temps qui existe, qu’il faut traité aussi».
Un Monde Meilleur (8×52′) est à voir sur Canal +