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Écrire et réaliser la série LA FIÈVRE : les secrets d’Eric Benzekri et Ziad Doueiri !

« Il ne restait qu’une chose à faire : se replier sur soi-même et se taire aussi longtemps que dureraient la fièvre et le délire des autres. »

Le Monde d’Hier de Stefan Sweig

C’est ainsi que le titre de LA FIÈVRE a été choisi par Eric Benzekri. Les oeuvres de Stefan Sweig sont à maintes reprises citées par les protagonistes au cour de l’histoire. LA FIÈVRE, c’est aussi les retrouvailles d’un duo de génie Eric Benzekri (en collaboration avec Laure Chichmanov et Anthony Gizel)  à l’écriture et la création et Ziad Doueiri à la réalisation, eux qui ont fait ensemble la première saison de Baron Noir. Lors de la conférence de presse sur la série, j’ai eu la chance de poser quelques questions afin d’en savoir plus sur cette fièvre qui les a animé pendant tout le processus de création de la création originale de Canal +.

 

La Fièvre d’un véritable duo magique écriture/réalisation

Quand Eric Benzekri a débuté l’aventure Baron Noir, il l’a faite avec Ziad Doueiri à la réalisation. Le succès de la saison 1 a amené la saison 2 et 3. Même si Ziad Doueiri a laissé la place à d’autres réalisateurs pour la suite, cette expérience Baron Noir a vu la naissance d’un duo auteur/réalisateur fiable. D’ailleurs, Eric Benzekri confie que dans son process d’écriture, il n’hésite pas à faire des « ziaderies » et il explique : « Quand j’écris, je me dis : est-ce que Ziad va aimer ? Je reconnais que je bouge un peu à l’écriture parce que j’écris un peu des ziaderies, c’est-à-dire il y a déjà un peu des mouvements de caméra pour lui, pour qu’il ait envie et et heureusement, il est venu, parce que oui, je pense qu’on sait faire sans lui, mais quand même, c’est beaucoup mieux avec lui, parce que c’est Ziad ». Rappelant qu’il forme « comme d’habitude une bonne équipe« .

Le réalisateur Ziad Doueiri ne tarit pas d’éloge sur le travail d’Eric Benzekri qui a lui a proposé un vrai défi avec cette série comme il le dit : « Je peux vous dire que c’est le travail le plus complexe que j’ai eu de tous les projets que j’ai fait ! Il fallait rester fidèle à l’histoire qui est extrêmement riche. En tant que réalisateur, qu’est-ce qu’on cherche ? Une belle histoire, la structure, est-ce qu’on s’attache à ce personnage et quel est le contexte de l’histoire et pour vous, peut être, La Fièvre est une série qui représente la France, parce que ça se passe en France. Ce qui était très touchant pour moi, c’est que le sujet de La Fièvre ne s’applique pas seulement à la France, ça s’applique vraiment partout. Je peux la mettre au Liban, parce que je suis libanais, je peux la mettre aux États-Unis, parce que je détiens la nationalité américaine, ça s’applique et c’est quelque chose qui dépasse juste les frontières françaises. Et j’essaye toujours de élargir l’horizon de ne pas rester local, parce que c’est bien de voir quelque chose que les Français peuvent s’identifier mais c’est encore mieux si d’autres cultures peuvent s’identifier et c’est ce qui s’est passé, c’est universel.« 

Ce fut encore plus complexe quand il a fallu imaginer l’écran géant avec toutes les vidéos des réseaux sociaux, Ziad Doueiri, hermétique aux réseaux sociaux à dû « s’éduquer » selon ces termes sur le sujet. Le réalisateur s’exprime : « C’était la partie la plus laborieuse que j’ai eu de ma vie. J’ai jamais galéré aussi, tant pour essayer de construire cet écran […] Je voulais pas faire ça en post-production […] Tout ce que vous voyez, quasiment 95 % des images sur cet écran, on les a fabriqués, on n’a rien acheté. On 240 vidéos Tik Tok qu’on a tourné,  Eric a engagé quelqu’un pour écrire, les textes sur sa supervision, et chaque Tik Tok que vous voyez dans nos écrans, chaque Instagram, tout, on les a tournés. » Vous imaginez le travail titanesque que cela a été et pour un résultat époustouflant ! L’écran a été inspiré de celui de la gestion de crise de la SNCF installé par Visibrain.

 

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Xavier Robic
© Rémy Grandroques/QUAD+TEN/CANAL+

 

Pourquoi utiliser le football comme point d’entrée dans la série ?

Eric Benzekri : « Moi, j’aime le foot, ça m’intéresse j’essaye de recycler ma vie quotidienne. Quand vous passez trois heures par jour à lire les journaux, autant que ça serve professionnellement. J‘avoue consacrer une bonne demi-heure à la lecture de L‘Équipe comme on m’a appris à ne pas perdre dans mon temps de travail et que je suis un peu stressée par la production. Passer cette remarque amusante, mais c’est vrai que j’y ai pensé, je me suis dit mais quand même, tu vas pas parler de ça! L‘équipe, So Foot et tous les magasins, ça parle de société. […] J‘ai 50 ans et en 1998, j’avais 25 ans et c’était black/blanc/beur, je considère qu’il y a une petite évolution dans la vision qu’on porte sur le caractère rassembleur de ce sport pour l’ensemble de la nation et de la population en France. Je voulais parler de ça. Comment à travers le foot et la vision qu’on en avait, on avait une lecture de la société. Le foot rassemble, c’est-à-dire qu’il y a encore, en termes de génération, c’est évident, en termes d’origine sociale, c’est évident. En termes d’origine ethnique, c’est encore plus évident. Je pense que l’utilisation des symboles dans la politique, mais au-delà de la politique, dans ce qui nous rassemble, est très importante.Il y a des digues, il y a des lignes, et il faut tenir. Je pense que c’est une ligne de front, le football, et que tout n’est pas politisable tout le temps. C‘est des jeunes gens qui ont entre 17 et 32 ans avec des familles. Je voulais décrire ça, par exemple, Fodé, c‘est une famille française comme les autres. On le montre avec sa femme, avec sa petite-fille, il y a du fromage, une histoire de figurine animée, c’est c’est une famille française comme les autres. C’est ça que je voulais montrer. Le fait d’avoir une lecture raciale de tout permet de rien lire. Le box box, c’est un vrai débat dans le foot moderne. Je pense que c’est un sujet important qu’il faut en parler. »

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Ana Girardot
© Thibault Grabherr/QUAD+TEN/CANAL+

 

Enfin, ce qui rassemble le duo Benzekri et Doueiri, c’est un message…

Eric Benzekri : « Il y avait un but commun qui était de réussir à faire passer, je déteste ce mot, mais un petit message qui est que le collectif devrait être plus fort que n’importe quoi, en tout cas que le narcissisme généralisé. Et dans une société d’individus ce qu’on dit, au fond dans cette série, c’est que chaque individu a le choix de céder ou pas à la pression sociale, identitaire, culturelle, tout ce que vous voulez. Mais il y a des choix individuels qui sont faits. C’est la somme de ces choix qui fait qu’on prend collectivement le bon chemin et c’est un peu ça qu’on qu’on a voulu dire, je crois, même si on ne veut pas forcément dire quelque chose. On veut d’abord montrer le réel tel qu’il est. Et on pense qu’aujourd’hui dans une société le réel est masqué par la fiction, des narratives, des récits comme on-dit, peut être que le rôle de la fiction, c’est de montrer le réel tel qu’il est. Peut être qu’ils font passer par-là aujourd’hui pour voir vraiment ce qu’on a devant nous. »

 

La Fièvre (6×52′) à découvrir sur Canal +

Lubiie

Experte dans le domaine des séries, blogueuse passionnée depuis 2006, professionnelle de l'audiovisuel, reporter de festival, jury de festival et intervieweuse aux multiples questions en séries. Tout mon monde tourne autour de l'actualité des séries.

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